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L'Elian
15 mai 2015

Souvenir Rugissant

Souvenir rugissant

 

 

texture_28_steampunk

 

Fenrir avait le bateau en vue ! Enfin il était là, enfin elle allait pouvoir se débarrasser de sa robe. C'était, à cette heure-ci, son nouveau rêve. Enlever sa robe et prendre une douche ! Une bonne douche chaude. Rien qu'en y pensant elle eut un frisson de plaisir.

Mais en attendant, elle était là, pas loin du vide, à observer ce navire qu'elle chérissait, la prunelle de ses yeux et le refuge chaleureux de ses compagnons. Cet équipage insolite de treize bras-cassés bourrés de secrets. Fenrir, comme beaucoup d'enfants, avait eu beaucoup de rêves. Son dernier s'était réalisé ce soir, mais un rêve inavoué, enfouit tout au fond de son être, avait vu le jour au fil des ans. Planches après planches, vis après vis, la mécano avait construit avec Neir ce rafiot volant. Ce Rafiot qui avait pris une valeur toujours un petit peu plus importante à ses yeux à chaque fois qu'une nouvelle personne s'attablait dans la salle commune. Elle aimait penser que L'Elian avait réuni ces êtres différents et pourtant étonnement semblable pour la simple et bonne raison que c'est là qu'ils se sentiraient à leur place, sur ce navire sans attache.

La pirate leva les yeux et fixa les grandes voiles qui ondulaient mollement au gré du vent. Oui, L'Elian était sa fierté et l'équipage son bonheur. Impossible d'en douter. Une immense sourire étira ses lèvres.

Elle contourna le navire et trouva la corde qu'on avait laissé pendre pour remonter sur le navire. Elle commença à se préparer psychologiquement à escalader le cordage avec une robe quand elle se souvint qu'elle avait les mains prises : les bottes qu'elle avait retiré quelques minutes plus tôt… Fenrir les contempla quelques secondes, eut un hochement d'épaule et les lança par dessus le bastingage de toutes ses forces. Quand elle entendit le « boom » significatif, elle commença son ascension. Tout au long de son parcours elle ne put s'empêcher de penser à Valorah et Mirayhu … Et de les admirer … Comment faisaient elles pour porter ces horreurs toutes la journée ? Elle, ça faisait à peine cinq heures et elle n'en pouvait déjà plus … Les femmes étaient un mystère.

Arrivée sur le pont, elle poussa un grand soupir de contentement, qu'il était bon d'être chez soi ! En train d'astiquer ses armes, la mécano trouva Lucky assit sur le toit de sa cabine, il lui jeta un petit regard qui veut tout dire et eut un sourire. Fenrir n'eut pas besoin de se le faire « dire » deux fois … Elle se devait, pour elle comme pour les autres de retrouver une apparence normal.

La meccano s'arrêta quelques temps dans la salle d'eau et en ressorti les cheveux dégoulinants et le visage souriant. Une simple chemise, un pantalon et elle se sentait de nouveau elle-même.

Il était l'heure de finir le rêve … C'est à dire, compter les pièces ! La pirate jubilait.

Arrivée dans sa salle des machines, elle commença par pendre la robe à un tuyau, comme le lui avait appris Valorah, et à en détacher les deux bourses bien remplies. Le son qu'elles produisirent en heurtant le sol fut une caresse pour ses oreilles.

Fenrir s'assit alors à même le plancher, comme souvent, et vida son butin sur le sol. Le tintement des pièces les une contre les autres était exquis.

La mécano frétillait de joie devant l'amoncellement de tout cet or, pourtant, un éclat autre que le jaune caractéristique lui attira l'œil. Un éclat vert.

Une pointe de peur s'immisça dans l'esprit de la pirate. Elle retint son souffle et tendit fébrilement la main vers l'objet émeraude. La pointe de peur se mu en peur panique. L'objet en question était une vis. Une vis verte. Une vis en Algae. Une vis pleine de souvenirs, une vis à l'origine d'une histoire. La sienne. Celle de la gamine maudite, l'enfant brisée qu'avait été Fenrir.

L'enfant brisée qu'était toujours Fenrir.

Délaissant son butin, la mécano se saisit de ladite vis et l'observa, le regard déchiré entre la rage et la tristesse.

Finalement, ce fut la douleur.

Une boule se forma au creux de son estomac, déformant ses traits, crispant ses lèvres.

Les rires, l'émerveillement, le plaisir.

La boule remonta dans sa gorge, lui coupant le souffle.

L'explosion, la chute, l'impact.

Puis la boule explosa, libérant une larme, puis une autre.

Le feu, le sang. La Mort.

Un flot continu coulait maintenant sur les joues de la jeune fille.

Comme une gigantesque vague qui balaye tout, un flot de souvenirs jaillit, balayant les instants de bonheur qu'elle avait pût passer jusque là. Tout s'était terni face à ce retour en force de la Douleur.

La pirate poussa alors un long cri silencieux. Si la Douleur pouvait être atténuée grâce à un hurlement, Fenrir se serait arrachée les cordes vocales.

Et puis … Les autres ne devaient pas la voir comme ça … Jamais.

Tout lui revint en mémoire, l'odeur des cheveux de sa mère brûlant, la vue du corps de son père brisé, le rejet de tous. Sa fuite, son isolement, ses larmes.

Ces gouttes d'eau salées qui, même au travers des âges, n'avaient pas changé. Ces petites gouttes de rancœur, de tristesse, de douleur.

Les bons moments avaient un goût de culpabilité.

Fenrir se laissa tomber au sol et se recroquevilla sur elle-même, serrant la vis dans son point et contre son cœur. Ses parents lui manquaient terriblement. Il y avait tellement de choses qu'elle n'avait pas vécue.

Se faisant toujours plus petite sur le plancher de sa grande salle des machines, ses sanglots redoublèrent.

Sa poitrine était douloureuse, elle tremblait.

Elle pleura encore quelques instants, essayant de recoller les lambeaux de son cœur et de son âme.

Enfin les larmes se tarirent, laissant qu'un regard vide fixé sur un point invisible.

Puis la mécano' s'endormit. Toujours en position fœtal, la vis contre le cœur.

Elle se réveilla une heure après, les yeux rougis et enflés par les larmes, les cheveux plus en bataille que jamais et le poing serré sur l'objet de sa tourmente.

La pirate se releva, s'assit sur le sol, regarda la vis verte encore une fois et se trouva ridicule. A quoi bon pleurer sur le passé ? Il faut avancer, seul l'Avenir compte.

Pourtant, après la Douleur et la Tristesse, le doute l'assaillit. Que faisait cette vis dans les poches d'un nobliau ? Elles étaient uniques et créées spécialement pour le Celsior, elles portaient malheurs.

Cette vis ressemblait étrangement à un trophée. Le souvenir d'un exploit … Sinon, pourquoi garder dans sa bourse un objet à l'origine d'un désastre ?

Un goût amer lui envahit la bouche. Ce n'était pas un accident … C'était une machination … Elle en était persuadée.

Mais alors, Pourquoi le Celsior? Contre qui ? Comment ? Dans quel but ?

A défaut d'une vengeance, Fenrir ne voulait plus que des réponses.

 

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  • Il existe une multitude de Mondes et pourtant quelques âmes se sont retrouvées et réunies pour se lancer dans une folle aventure. A Bord de leur Trois mats volant, L'Elian, ils vont aller explorer les tréfonds des Univers !
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